Une fois passée ma période ado ultra contrôle freak de mon corps, durant laquelle j’effectuais une chasse méticuleuse concernant tout ce qui pouvait me différencier de la masse (c’est comme cela que l’on se retrouve avec le sourcil en point virgule et la gambette rasée à 14 ans)(mais si Maman tu comprends, mes poils ça me complexe énoooormément)(pitié je veux juste être comme tout le monde et me fondre dans la masse et ne surtout pas être la poilue du collège merci)(les ados sont cruels)(on va arrêter les parenthèses ici) ; je suis arrivée au constat que l’épilation de la jambe était un truc qui me soulait plus qu’autre chose. Bon gré mal gré, je profitais de la trêve hivernale pour espacer les coups de rasoir et laisser un peu de répit à mon poil. Et puis en février dernier, j’ai testé de faire de la pâte de sucre maison, me suis épilée avec et là, oh étonnement, mes poils ont mis plusieurs semaines à repousser et ils l’ont fait de manière très étonnante. Très fin, blond, assez doux. En fait, je trouvais ça très joli et là, j’ai commencé à me questionner.
Pourquoi je m’épile les jambes ?
Est-ce que moi, juste moi, cela me dérange ? Non, je ne crois pas… En plus ça me soule clairement de le faire. Alors pourquoi est-ce que je m’inflige cela ? Je crois que dans l’inconscient collectif d’aujourd’hui, une femme avec des poils, n’est pas une femme. Elle n’est pas féminine, pardon. Elle ne prend pas soin d’elle, se néglige, et surtout mon dieu, c’est très triste, ne cherche certainement pas à être désirable. Mais pourtant, il me semble que ce poil si répugnant est bel est bien là, il fait partie de notre patrimoine féminin de base. Pourquoi est-il si mal vu le pauvre ?
De qui vient cette pression ?
Pour moi, cette pression sociale autour d’un corps féminin lisse et imberbe est injuste. On devrait être libre de s’épiler ou non. Il n’est pas question ici de jeter la pierre aux nanas qui s’épilent, au contraire, je souhaite vraiment faire passer un message de tolérance. Chacun fait ce qu’il veut b**** edlj*ze qp$dz^. C’est un peu comme le port du soutien gorge. Dans quelle mesure, le regard de quelqu’un qui nous est complètement extérieur et dont, au final, on se fout un peu de l’avis, doit compter dans la façon dont on perçoit notre corps ? Et je me posais aussi une autre question… De qui vient cette pression ? Des hommes, des femmes, de nous mêmes ? J’ai souvent l’impression que les femmes sont très intransigeantes entre elles et vont regarder d’un mauvais œil celles qui ne s’intéressent guère à leur pilosité… A creuser.
Comment je les ai vécus, ces six mois poilue ?
Pour des raisons d’esthétique et de confort qui me sont propres, je n’ai pas le même rapport avec le reste de ma pilosité que celle de mes jambes. Depuis cette fameuse épilation à la pâte de sucre, mes poils naturels sont réapparus, comme je le disais plus haut, blonds, dorés, jolis quoi. Le processus s’est fait un peu par hasard, je n’avais pas vraiment prévu de me lancer dans cette petite expérience. Et attention, je vis dans le sud, donc depuis mai, je suis en robe/short/jupe en permanence sans ressentir de gêne particulière quant à mes jambes. En fait, ces pauvres petits ne me dérangent absolument pas.
Je ne trouve pas que cela atteint mon intégrité physique, je n’ai pas l’impression de « me négliger » mais plutôt d’aimer mon corps dans son entièreté et surtout de l’accepter enfin pleinement.
Je ne suis plus en guerre permanente, en traque continuelle du moindre poil qui dépasserait, j’ai lâché du lest et ça fait tellement de bien.
Presque débutée sur un malentendu, cette « expérience » aura été l’une des plus salvatrice de ma transition vers plus de lâcher prise. Même si les poils sur mes jambes gênent certaines personnes, au final, en quoi cela me concerne ? Ce n’est certainement pas pour un regard en biais dans le métro de Marie, que je ne connais ni d’Eve, ni d’Adam, que je vais passer une heure par semaine à traquer le oilp dans ma salle de bain. Et puis pourquoi cela les gêne t’elles, d’ailleurs ? Je n’oblige personne à l’autodafé de rasoirs et bandelettes de cire. Au contraire, le plus important pour moi c’est d’être en accord avec ce que l’ON veut. Si l’on a envie d’avoir les jambes épilées, je ne vois pas le problème, et inversement.
Depuis que j’ai laissé libre cours à la repousse pileuse sur mes gambettes, j’ai ressentie une réelle sensation de liberté. Et un soulagement. Vous savez, ce moment, où, vous êtes juste bien. En harmonie, en phase, avec ce corps qui vous accompagne depuis des années.
My body, my rules
Comme j’adore regarder mon basilic pousser, je m’épanouis au travers de cette forme de vie qui habille mon corps. Qui me rappelle que rien n’est figé. Que les choses s’acceptent. Que parfois il est plus facile de vivre en paix avec ce que l’on pense être un « nuisible » plutôt que perdre son énergie à le traquer.
Il y a quand même une démarche hyper sado masochiste derrière l’épilation, non ? Non seulement ça fait mal (ok ok, pas toujours, pas chez tout le monde blablabla), mais en plus, c’est une bataille perdue d’avance ! Dans une semaine, leurs petites têtes noires vont poindre à nouveau le bout de leur nez et ça va recommencer. Encore et encore.
Il y a une ou deux semaines, j’ai décidé de me reépiler, pour voir. Verdict ? Je préfère quand mes poils dorés sont là. Etonnement, je suis déçue de m’être épilée à nouveau.
Laisser mes petits poils habiller mes jambes, le revendiquer, en discuter avec qui veut, c’est un peu ma façon pacifiste de dire « fuck » à une société dont certaines normes et codes me pompent l’air. Et vous savez quoi ? En 6 mois de poils, dont environ 4 en shorts et compagnie, je n’ai eu qu’un regard « choqué ». C’était qui ? Une petite nana de 19 dans le métro qui a fait les gros yeux à sa copine en montrant mes jambes… Alors ?
Donc oui, vous pourrez avancer des tas d’arguments : tu es blonde, tu as les poils fins, tu as de la chance, etc, etc. Oui peut-être. Mais tant que vous n’aurez pas fait l’expérience vous même, qui va bien au delà de juste apprécier sa pilosité en tant que composante même de son corps, vous ne saurez pas. C’est peut-être plus simple pour moi, mais ce n’est évident pour aucune fille/femme en 2016 de tirer un trait sur l’épilation.
D’ailleurs, vous, vous entretenez quel rapport avec votre pilosité ? Vous en pensez quoi ? J’ai hâte d’échanger avec vous autour de cela.
Comme toujours, ma conclusion c’est tout simplement, vivez heureuse, poilue, épilée, semi-épilée, tant que c’est un choix fait en pleine conscience qui n’entrave pas la perception que vous avez de vous même. Vous êtes jolies. Peu importe le nombre de poils qui recouvrent votre corps.